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1. Les anémies.

  L'anémie s'apprécie par le taux d'hémoglobine avec les seuils suivants :

  Les anglosaxons préfèrent parfois utiliser l'hématocrite comme référence. C'est d'autant plus acceptable que les seuils de transfusions s'expriment en fonction de l'hématocrite:

  La quantité de sang total à transfuser est encore une fonction de l'hématocrite. Plusieurs règles de calcul existent. Mais quelques points sont plus importants à retenir qu'une fonction compliquée :

  Le diagnostic précis d'une anémie nécessite impérativement un comptage des réticulocytes (= polychromatophiles) chez nos carnivores domestiques. Celui-ci fait appel à une coloration spécifique au bleu de crésyl brillant du frottis ou au thiazole orange en cytométrie de flux. Classiquement il était d'usage d'utiliser un taux de réticulocytes corrigés, le taux de réticulocytes étant proportionnel au nombre de globules rouges non nucléés :

Tc = T réticulocytes observés* HTC observé / HTC normal

De plus en plus on préfère interpréter le nombre absolu de réticulocytes pour classer les anémies. Ces valeurs ne semblent pas parfaitement standardisées et les tableaux suivants sont fournis à titre indicatif , mais pas à titre de référence:

Régénération Minimum Maximum
nulle 0 55000
Faible 55000 150000
Modérée 150000 300000
Forte 300000 >500000

Régénération Minimum Maximum
nulle 0 15000
Faible 10000 160000
Modérée 150000 1000000
Forte 1000000 >1500000

  Chez le chat coexistent deux populations de réticulocytes :

  Dans ces conditions les normes apparaissent encore plus floues, si l'on ne distingue pas les deux populations.

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1.1 Les anémies fortement régénératives.

1.1.1 Les anémies hémolytiques.

   On distingue cliniquement :

  Au commencement des hyperhémolyses, ces signes ne sont pas toujours cliniquement décelables. Et étant donné la brutalité de certaines formes cliniques, il convient de ne pas attendre ces symptômes avant d'envisager le diagnostic d'anémie hémolytique, surtout chez le chat. Le frottis sanguin est particulièrement riche en renseignements dans ces cas.

anisocytose & anisochromie

L'anisocytose et l'anisochromie sont des signes de régénération, dans la mesure où les jeunes hématies sont plus basophiles et plus grosses. Un erytroblaste (hématie nucléée) est visible en haut du champ.

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réticulocytes et erytroblaste

Les érytroblastes sont libérés précocément dans la circulation. Les réticulocytes surviennent 4 à 6 jours après l'apparition de l'anémie. La présence d'érytroblastes en l'absence de réticulocytes signe une dysérythropoïèse ou une anémie régénérative débutante. Un corps de Howell-Jolly (ADN résiduel) est visible dans un réticulocyte.

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Corps de howell-Jolly

Les corps de Howell-Jolly sont fréquents chez le chat et un taux <5% est considéré comme normal. Ils augmentent en cas d'anémie souvent à caractère hémolytique. S'ils sont présents en l'absence d'anémie une exposition de la moelle osseuse à un agent cancérigène est à redouter.

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1.1.1.1. Les anémies hémolytiques parasitaires.

Piroplasmes

Babesia canis : La forme mérozoïte piriforme est la forme la plus communément observée, par paire comme ici, ou parfois en tétrade.

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piroplasmes libres

Babesia canis :Les trophozoïtes de piroplasme ne sont qu'exceptionnellement visibles.

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hemobartonelles

Hemobartonella felis s'observe en périphérie des hématies, elle n'est visible que pendant certaines périodes de la maladie et il ne faut pas les confondre avec des artefacts pigmentaires.

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1.1.1.2. Les hyperhémolyses immunes (c'est un gros morceau, accrochez-vous!)

  Ce sont les plus fréquentes après les formes parasitaires. On distingue classiquement :

Pour simplifier, les AHAI sont primaires et les AHMI sont secondaires à une autre affection. Personnellement j'utiliserai la notion générique d'Anémie Hémolytique Immune (AHI) pour regrouper les deux entités dont la distinction clinique et pathogénique n'est pas toujours évidente. En revanche il convient d'essayer de distinguer les formes extra-vasculaires des formes intra-vasculaires:

Extra-vasculaire

Intra-vasculaire

Fréquence 80% 20%
Evolution

Subaiguë à chronique

suraiguë

Splénomégalie / hépatomégalie

oui

non

Forme immunitaire

souvent AHAI

souvent AHMI

Effecteurs

IgG+macrophages

complément +/- IgM

Pronostic

bon

sombre

 

Epidémiologie :

  Les animaux atteints sont jeunes ou d'âge moyen. Certaines races sont prédisposées, notamment le cocker spaniel et le caniche. Les femelles non stérilisées sont aussi plus souvent concernées avec une influence du cycle ovarien sur l'incidence des ces affections.

 Le Lupus Erythémateux Disséminé est un facteur majeur prédisposant aux AHAI.

 

Pathogénèse :

  L'élimination des hématies endommagées ou sénéscentes se fait naturellement par le système réticulo-endothélial. Plusieurs mécanismes contribuent à emballer le processus en conduisant à une destruction excessive.La pathogénése

 

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Etiologies des formes secondaires (AHMI)

Chien

Chat

Bactéries leptospirose, pyomètre hémoplasmes
Virus parvovirose FeLV, FIV, PIF, panleucopénie
Parasites ehrlichiose, babesioses babésioses
Tumeurs myélome multiple, lymphomes, cancers lymphomes, cancers
Iatrogène vaccination, cefalosporines ?

 

Diagnostic de laboratoire.

Les grands réticulocytes hypochromes et déformés ont peu de chance de donner des hématies fonctionnelles. Les hématies qui n'ont plus de pâleur centrale sont des sphérocytes et signent une anémie hémolytique. Le caractère péjoratif des réticulocytes laisse supposer un pronostic sombre pour cette chienne.

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Les microsphérocytes sont identifiables chez le chat, uniquement par comparaison avec des hématies normales.

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rouleaux d'hématies

Chez le chat les rouleaux peuvent se former en l'absence de pathologie. Dans le cas présent ils sont très nombreux et s'inscrivent dans un contexte d'autoagglutination pathologique dûe à une anémie hémolytique.

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rosette d'hématies

La rosette est une autre forme d'autoagglutination. Ici il s'agit d'un chien atteint de piroplasmose. L'hémolyse est autant dûe à une destruction directe des hématies par les parasites qu'à un phénomène à médiation immune.

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Traitements.

  En dehors des hémolyses médicamenteuses et de la maladie des agglutinines froides, le traitement est non spécifique et fait appel à des immuno-suppresseurs pendant des durées de 3 semaines au strict minimum. Il est fortement recommandé de poursuivre les traitements à dose décroissante sur 6 semaines.

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1.1.1.3. Les hyperhémolyses mécaniques

   Certaines modifications de la microcirculation sont à l'origine de turbulences du flux sanguin qui endommagent les membranes érythrocytaires. Les étiologies les plus fréquemment rencontrées sont :

  Les écchinocytes peuvent être artefactuels lors de :

acantocytes

Les écchinocytes sont crénelés, ils seront inévitablement éliminés par le système réticulé. Ils signent une micro-angiopathie lorsqu'ils ne sont pas artéfatcuels.

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echinocytes

Chez ce chien atteint d'un hémangiosarcome, des rouleaux sont observés en plus des écchinocytes et d'acantocytes.

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dacryocytes

Les écchinocytes sont accompagnés de dacryocytes. Un schizocyte est visible.

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Schizocytes

Nombreux schizocytes. Chien

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1.1.1.4. Les hyperhémolyses oxydatives

 L'oxygène et le fer présents dans le sang constituent un mélange "explosif" capable de former des radicaux hydroxyl, fortement oxydants. Les modifications membranaires et de l'hémoglobine apparaissent lorsque les systèmes de régulation anti-oxydants des hématies sont saturés par d'autres oxydants extrinsèques :

eccentrocytes et keratocytes

Les kératocytes sont parfois assimilés à des schizocytes. Ici ils apparaissent plutôt apparentés à des éccentrocytes endommagés. Des microsphérocytes sont également visibles. Ce chat atteint de panleucopénie présentait en outre une anémie hémolytique.

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coprs de heinz

Les corps de Heinz s'observent normalement grâce à une coloration au crystal violet. Il est néanmoins possible d'en identifier certains au MGG par une légère protubérance sur la membrane. Chez le chat ils sont pathologiques au-delà de 5%.

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  Le chat est particulièrement sensible et dans les cas sévères on peut observer une méthémoglobinisation macroscopique du sang (couleur marron).

 Le traitement symptomatique fait appel à la vitamine C associée à une fluidothérapie. Dans les cas sévères on peut essayer le bleu de méthylène en IV à la dose de 1mg/kg, en administration unique.

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1.1.2. Les hémorragies.

  Très souvent il existe une hypoprotéinémie associée. Seules les anémies aiguës sont très régénératives, mais comme les anémies hémolytiques, l'apparition des réticulocytes est différée de 4 à 5 jours.

  Une leucocytose avec neutrophilie avec left shift apparaît immédiatement après l'hémorragie, mais elle est fugace, elle correspond à une démarginalisation.

 Les formes chroniques débouchent sur une anémie ferriprive (voir ce terme).

Parmi les causes envisagées on pourra retenir :

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